Voilà que "l'Ange" de Savoye avait entreprit un voyage vers l'Ouest, dans une discrète voiture à deux chevaux. Elle n'avait emporté avec elle que quelques provisions, de sobres vestements de rechange, et la petite orpheline de quatre ans qu'elle avait adoptée, Louise. D'ailleurs, depuis deux heures, la petite la tourmentait, avec ses "Et là, on arrive bientôt ?", si bien qu'elle s'était mise à lui conter une vieille légende savoyarde, qui parlait d'une Vouivre logeant dans une grotte.
Mais pourquoi se rendre à l'Ouest, me demanderez-vous ? Et bien, avec deux desseins. Le premier était de rendre visite à son cousin, qui passait le plus clair de son temps ici, et de discuter avec lui de ce dont ils avaient déjà parlé. Et puis aussi, parler de Louise. Et en second lieu, continuer son périple un peu plus au Sud, pour aller se recueillir sur la tombe de son oncle Guido, et peut-estre saluer sa tante et sa cousine, restées à Maledent, lui semblait-il.
Et enfin, elles arrivèrent. Descendant de voiture, la douce Louise, dans les bras de sa mère d'adoption, attrapa le lourd heurtoir entre ses petites mains, le souleva, et le lascha brusquement, ce qui lui fit faire un bruit du tonnerre.
- Louise ! Qu'avions-nous dit ? Pas de bruit !
Bien marrie de s'estre faite gronder, la blonde enfant enfouit sa teste dans le cou et les cheveux d'Aélis, avant de murmurer :
- Mais Maman, je veux voir le Ristote !
Elle avait eu beau lui expliquer en long, en large et en travers que "Le Ristote", qui n'était autre qu'Aristote était mort depuis belle lurette, mais qu'il fallait le prier quand même, la petite n'en démordait pas. Elle voulait voir le Ristote, couste que couste. Enfin, en attendant, la Dame de Cerrione posa un doigt sur ses lèvres, pour lui rappeler de ne pas parler à tort et à travers, comme elle avait l'habitude de le faire, et attendit qu'on vienne lui ouvrir.